Le Carnet d'Ysengrimus

Ysengrimus le loup grogne sur le monde. Il faut refaire la vie et un jour viendra…

  • Paul Laurendeau

  • Intendance

La laïcité, otage de notre ethnocentrisme

Posted by Ysengrimus sur 7 avril 2019

Le projet de loi 21 sur la laïcité est sur le point d’être soumis â l’Assemblée Nationale du Québec. Il prévoit que le port des ci-devant signes religieux sera interdit pour les employés de l’état en position d’autorité, comme les policiers, les juges, les gardiens de prisons, et les enseignants des écoles primaires et secondaires. Dans les faits, c’est le redémarrage en trombe du bon vieux harcèlement institutionnalisé des femmes voilées. Les 7 du Québec vont vous formuler ici, une bonne fois, leur position éditoriale sur cette question.

Lâchez-moi avec les figures d’autorité. Ce projet de loi inique postule de façon axiomatisée et sans contrôle, la notion autoritaire de figure d’autorité. Le pléonasme s’impose parce que l’autorité est une notion qu’il est fort malsain de postuler sans contrôle. Un policier n’est pas une autorité pour moi. C’est un type particulier de fonctionnaire civil, membre d’un corps constitué et chargé d’un certain nombre de fonctions de protections (d’ailleurs souvent abusées — les policiers sont les Pinkertons de la bourgeoisie, tout le monde le sait). Un juge est un agent de diffusion et d’imposition du droit bourgeois. Son pouvoir n’a rien à voir avec de l’autorité, au sens fondamental du terme. Une enseignante fait partie d’un appareil idéologique d’état dont l’autorité est inexistante (barouettée qu’elle est entre une bureaucratie scolaire trouillarde et des parents hélicoptères arrogants et arrivistes qui passent de plus en plus leur commande de pizza en traitant l’école comme une sorte de structure de gardiennage inféodée à leurs propres fantasmes autocrates). Mon hygiéniste dentaire, mon infirmière de première ligne et Robert Bibeau (directeur des 7 du Québec) ont plus d’autorité sur moi que tous ces guignols. La première parce que sa parole a une influence directe sur la qualité de mes dents, la seconde parce que sa pensée a une incidence profonde sur le tonus de mon corps, le troisième parce que sa vision du monde et son ascendant intellectuel influent mes conceptions, et mon action en conséquence. La notion inepte de figure d’autorité de ce projet de loi est un comédon bourgeois, solidement tributaire des dérives anti-démocratiques contemporaines les plus virulentes.

Le signe religieux, notion vaseuse. J’ai démontré ailleurs que le voile n’est pas un signe religieux. J’ai aussi fait observer que le kirpan est, lui, un signe religieux et qu’il est nuisible non comme signe religieux mais bien comme arme offensive. On ne va pas revenir là-dessus. C’est ici, juste ici, que notre ethnocentrisme s’installe confortablement, comme un pacha vautré sur son lit d’évidences bouffies. Sans analyse, ethnographique, historique ou autre, et du haut de notre chaire bien pensante de petit occidental étroit, on décrète implicitement que l’objet visible ceci ou cela (toujours d’origine exotique — ceci NB, les crucifix passent habituellement sous le radar) est un signe religieux. Pourtant, quand on donne vraiment la parole aux musulmanes, elles nous expliquent bien souvent que le voile est porté pour des raisons ethnoculturelles procédant assez fréquemment de la pudeur élémentaire. Mais nous, sourds ne voulant rien entendre, on décrète plutôt, dans le mouvement, le statut de signe de ces différents artefacts vestimentaires. On les traite alors comme on traiterait le macaron d’un militant politique ou la pancarte d’un homme-sandwich. Cettte sémiologisation de l’exotisme vestimentaire est un pur ethnocentrisme déguisé, rien de plus. On en revient, assez ouvertement, à la vieille logique de l’uniforme. On réintroduit des particularités unilatérales de conformité d’apparence, vieille lune réactionnaire que l’on croyait définitivement disparue de nos sociétés depuis les patatras juvénilistes des belles années yéyé. Nous sommes donc en train de solidement régresser sur un des droits de la personne le plus profond, celui de la tenue vestimentaire, qui procède de l’intimité corporelle longtemps, très longtemps avent de procéder des cultes. L’indice le plus criant qu’il n’y a rien de théologico-mystique dans tout ceci et que tout y procède en fait de la vie ordinaire la plus prosaïque, est révélé par le fait que ce sont principalement les femmes qui font l’objet d’attaques sur ceci. Ben oui… dans nos cultes patriarcaux malodorants, les femmes ne sont jamais des curés ou des imams, vous aviez pas remarqué? Elles ne sont jamais que des citoyennes ordinaires. Et, de tous temps, la résistance des femmes s’est manifestée dans l’intendance de leur apparence physique. Et de tous temps, elles ont été attaquées sur ce point par le phallocratisme classique. Ce type d’attaque et de traitement en bouc émissaire se perpétue aujourd’hui, tout simplement. Or, où sont nos féministes quand il s’agit de défendre le libre arbitre vestimentaire de nos compatriotes musulmanes?

Blâmer le Canada anglais. Nos compatriotes québécois du cru, eux, surtout ceux d’obédience droitière, se gargarisent dans les nuances byzantines du multiculturalisme et de l’interculturalisme. Cette distinction, creuse et verbaliste, est un moyen malsain pour nos compatriotes du cru d’accuser le Canada anglais d’être trop permissif et de nous imposer un laxisme communautariste qui serait anglo-saxon, et dont nous ne voudrions pas, par essence. C’est la vieille analyse voulant que le Canada anglais se serve perfidement des immigrants pour nous assimiler et nous emmerder. Il va falloir se réveiller et sortir un petit peu de nos lubies victimaires d’autrefois. L’occupant colonial canadien (copieusement méprisable d’autre part — là n’est pas la question) nous impose quoi finalement: une charte des droits assortie d’un solide mécanisme de clause dérogatoire. Ce mécanisme permet, sur des questions fondamentales, à une province de déroger de la charte des droits pour des raisons procédant, disons, des intérêts supérieurs de la nation (ici, la nation québécoise). La clause dérogatoire est ici automatiquement déclenchée au sein même du libellé du projet de loi 21. Autrement dit, le toutou rouge et blanc anglo-canadien va devoir rester à la niche et ne pourra pas nous imposer sa logique multiculturaliste disjointe de la nôtre (si disjonction il y a, tant que ça). Alors cessons de blâmer le Canada anglais. Il est hors du coup sur ce coup. Par contre, nos nationaleux petits-bourgeois vont devoir allumer leurs lumières sur un point. C’est que le Québec a, lui aussi, sa propre charte des droits fondamentaux, amplement singée sur celle du Canada anglais. Dans sa logique bourgeoise, aussi implacable qu’inepte, la nation québécoise ne pourra pas invoquer une clause dérogatoire contre sa propre charte des droits. C’est pas possible, c’est la nôtre, l’occupant colonial n’a rien à y voir. Et ça, le gouvernement québécois ne le dit pas trop fort. Les lamentations judiciaires (car lamentations judiciaires il y aura, sur le moyen et le long terme) n’auront qu’à s’appuyer sur une interprétation juridique de la charte québécoises des droits et libertés, sans que les anglo-canadiens n’aient rien à y voir. Le problème droit-de-l’hommiste de toute cette question reste donc entier. Même avec le Canada anglais hors du coup, la bombe à retardement des tribunaux reste entièrement amorcée.

Déréliction ou polarisation? Alors, revenons au hockey de base, comme on dit si bien chez nous. Que voulons-nous, dans toute cette histoire? Ethnocentrisme et malhonnêteté intellectuelle à part, à quoi aspirons-nous? Eh bien, notre petit consensus historique local est qu’on s’est assez fait mourir le cœur à sortir les curés du Québec (qui régnèrent, selon le modus vivendi d’une intendance théocratique coloniale typiquement victorienne, de 1840 à 1960), c’est pas pour laisser les mollah les remplacer. Ce qu’on veut, ce qu’on souhaite donc, c’est que notre déreliction sociétale, bien engagée depuis un demi-siècle, poursuive son cours tranquillement, sans se faire perturber par les effets indésirés d’une conjoncture migratoire. Il est important de comprendre ce point. Ceci n’est pas une croisade. La notion promue (hypocritement ou sincèrement) c’est la notion de laïcité, pas celle de christianité. Alors, on veut que tout le monde, immigrants inclus, découvre les vertus d’une civilisation permissive, non-cœrcitive, égalitaire, civique, et articulée en rationalité. Ce genre de programme civilisationnel (osons le mot), militant (pourquoi pas) doit se donner une méthode. Il faut, en un mot, que, graduellement, et par delà les réflexes autoprotecteurs typiques des diasporas déracinées, nos compatriotes de branches aient envie d’embrasser nos valeurs pluralistes et laïques, sereinement et sans crispation. Pensez-vous vraiment, en saine intendance, qu’une intervention autoritaire grossière et frontale de type projet de loi 21, va réaliser cet objectif? C’est de la bien mauvaise sociologie que de s’imaginer ça. On va tout simplement fabriquer des martyrs, et confirmer nos compatriotes de branches de la nécessité toxique et hautement malsaine d’invoquer l’autorité victimaire. On voulait la déreliction sereine et graduelle, on va se retrouver avec la polarisation abrupte et crispée. Ainsi, une portion significative de nos compatriotes qui auraient pu s’intégrer sans trompettes vont maintenant se braquer et résister, passivement ou activement, à notre vision du monde. C’est la perpétuation de l’Effet Drainville. Les extrémistes des deux bords vont adorer le projet de loi 21. Sa méthodologie déficiente va avoir l’effet contraire de ce qu’il affecte de souhaiter. On se prépare un bon lot d’emmerdements futurs et de radicalisations inutiles, évitables, pinailleuses, et non avenues. Il aurait fallu faire de l’extinction sur la question du voile. Il aurait fallu dire: je ne suis ni pour ni contre le voile, je suis pour le libre arbitre authentique. Ma compatriote musulmane veut garder son voile, elle a ma solidarité. Elle veut retirer son voile, elle a ma solidarité. Je l’accompagne patiemment et respectueusement dans sa réflexion intérieure, dans un sens ou dans l’autre, sans plus. Maintenant, on tourne le dos à ça. Maintenant, on prétend arracher le voile autoritairement alors qu’il suffisait simplement d’attendre qu’il tombe tout doucement de lui-même.

Ce que serait la vraie laïcité. Entre démagogie électoraliste et ethnocentrisme déguisé en grande idée, c’est pas de la laïcité qu’on aurait ici. La vraie laïcité consiste historiquement, dans nos civilisations, à retirer le pouvoir religieux des structures hospitalières (ça, c’est fait depuis l’après-guerre environ) et scolaires (ça c’est pas fait du tout). Aussi, si vous voulez un vrai projet de loi laïc, concevez-en un qui abolisse l’intégralité du financement public des écoles confessionnelles de tous tonneaux, protestantes et cathos inclues. Mieux, dans une vraie laïcité robespierriste ou léniniste, les écoles confessionnelles deviendraient tout simplement illégales et seraient démantelées au profit d’un système intégralement public et athée. On n’y est pas, au Québec. On en est loin. Or, quand on mentionne ce que serait la vraie laïcité effective à nos petits droitiers locaux, là c’est: mais les systèmes catho et protestant sont protégés par la constitution canadienne. On ne nous laissera jamais faire ça. Ah bon? Et la clause dérogatoire, elle est à géométrie variable? On est prêts à brandir le nonobstant de la clause dérogatoire quand il s’agit d’agresser stérilement nos compatriotes musulmanes dans leurs droits intimes. Mais quand il serait temps de mettre en éclisse les vraies structures malodorantes de propagande religieuse que sont les réseaux scolaires confessionnels, là, il y a plus personne, et surtout, plus de courage politique pour invoquer la susdite clause dérogatoire en faveur d’une vraie laïcité systémique. Alors lâchez-moi ici avec la laïcité, notion d’ailleurs empruntée tardivement aux français et fort mal dominée localement (on leur a piqué le mot sans assumer vraiment, comme ils le firent, la radicalité de la chose). La soi-disant laïcité, au nom de laquelle nous sautillons tous comme des cabris, n’intéresse pas vraiment nos gouvernementaux. Elle est ici tout simplement l’otage de notre ethnocentrisme, rien de plus.

Le capitalisme raffole des chicanes sociétales. Le projet de loi 21 est une ineptie d’un mur à l’autre. Il ne rencontrera pas ses objectifs (réels ou proclamés) et il va foutre la division, sans plus. Or, quand vous perpétuez des divisions de ce type dans une société de classe, c’est la majorité des masses que vous divisez contre elle-même. Or diviser les masses, dans les sociétés industrielles et post-industrielles, c’est diviser le prolétariat, toujours. Le capitalisme raffole de ce genre de chicanes sociétales. Tout le monde perd son temps avec ça, s’empoigne, chichine, monte au front en tous nos militantismes de toc, et rien n’avance pour ce qui en est de la seule lutte utile sous nos deux hémisphères: la lutte des classes. Ne cherchez pas la raison de cette promotion étatique de la distraction ethnocentriste. Elle ne sert même pas les convulsionnaires droitiers qui en vibrent de travers et finiront aussi couillonnés que les autres. Ce genre de disputes de chiffonniers, au propre et au figuré, sert le Capital, rien d‘autre. C’est une agitation de somnambules qui ne prépare qu’une seule chose: des réveils difficiles.

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Paru aussi dans Les 7 du Québec

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50 Réponses to “La laïcité, otage de notre ethnocentrisme”

  1. La définition de la laïcité change suivant qui la donne. Il faut toujours rechercher le but des nouvelles définitions, comprendre qui tire les ficelles. Hier c’étaient les Juifs, aujourd’hui ce sont les Musulmans que des politiciens ciblent, et pour camoufler, ils s’en prennent aux deux (vêtements, abatage rituel Kasher et Halal, circoncision…) surtout s’ils sont antisionistes. L’État n’est pas habilité pour trancher des questions religieuses. Pour cela, il y a des autorités religieuses (Rabbins, Cheikh…), les politiciens doivent s’occuper de politique et gérer de sorte que toutes les communautés vivent paisiblement ensemble dans le respect des lois du pays. Et si on veut parler de démocratie, il faut respecter le pourcentage. Quant aux signes religieux ou d’identité, ils doivent être libres dans un État laïc. Si des autorités veulent défendre le foulard ou le chapeau, il faut aussi défendre la croix et ces édifices imposants et coûteux. De dire que la France ou le Canada sont des terres chrétiennes, c’est incorrect et hypocrite. Il ne faut pas confondre la nature d’un pays (comme par exemple la France qui est plutôt areligieuse) avec la main basse romaine qu’il a subi depuis le 5ème siècle.

    [Je doute très fortement que nos ethnocentristes québécois s’en prennent aux femmes voilées parce qu’elles seraient antisionistes. Franchement là, il y a des limites à charrier dans l’idée fixe et le hors-sujet. Je défends les présentes vues pour promouvoir la rationalité politique (dont nos gouvernants sont largement exempts), pas pour m’associer à certaines causes plus que douteuses de certaines personnes se disant musulmanes. Prière de ne pas m’embringuer dans ces débats unilatéraux. — Ysengrimus]

    • Caravelle said

      Monsieur, en tant que juive roumaine, je ne peux pas seconder votre propos. Les diasporas se répandent dans le monde pour toutes sortes de raisons complexes et, admettons-le, rarement heureuses. S’imaginer que les gens déplacés charrient avec eux je ne sais quelles lignes doctrinales qu’ils seraient en train se synapser de ci de là est une simple horreur. Les gens qui doivent se déraciner pour survivre charrient tout juste le petit ballot des douleurs de leur vie, et c’est tout. Fichons leur un peu la paix et cessons de faire de la politique démagogique sur leur dos et à leurs dépends.

  2. Robert Bibeau said

    @ Ysengrimus

    Yes. Lâchez-moi avec votre merde de figure d’autorité. La première figure d’autorité ce sont les parents et ils disent quoi les parents à l’État des riches? Christ nous la paix avec tes lois et tes ingérences dans notre vie quotidienne et dans celle de nos enfants.

    Les symboles religieux sont la manifestation d’une aliénation, tout comme quémander un emploi est aussi une manifestation de notre aliénation de classe. Sortir de l’aliénation ne se fait pas par une loi quelconque de l’État bourgeois grand ordonnateur de toutes les formes d’aliénation.

    Merci Ysengrimus

    Robert Bibeau http://www.les7duquebec.com

    [Il est assez patent, par dessus le tas, qu’ils nous servent derechef une petite bisbille sociétale pour masquer les combines et turpitudes pétrolières en préparation sur la Côte-Nord. Distraire la petite populace avec des cau-causes chicanières médiatisées, ça aussi, c’est servir la bourgeoisie… — Ysengrimus]

    • Perclus said

      Ysengrimus le signale bien, il y a deux notions foireuses dans ce projet de loi. Celle de FIGURE D’AUTORITÉ et celle de SIGNE RELIGIEUX. La première repose sur un autocratisme bourgeois implicite et assez brutal. La seconde repose sur l’ignorance ethnocentriste la plus crasse (on ne se renseigne jamais en profondeur sur les religions qu’on prétend pourtant encadrer par des lois civiques qui se veulent adéquates). Il est de plus en plus criant que nos gouvernants gouvernent aujourd’hui pour les réseaux sociaux comme ils gouvernaient autrefois pour le journal du matin.

  3. Vanessa Jodoin said

    Voile, legging, même combat, en fait.

    [Je seconde. — Ysengrimus]

    • Mirmille Marbre said

      C’est bien vrai ça. C’est toujours sur les modes vestimentaires des femmes que ça retombe, au bout du compte. Et malheureusement, nous, femmes, tombons dans le panneau plus souvent qu’à notre tour. Je voudrais dire à toutes les femmes que personne va vous forcer à porter des leggings ou des voiles. Laissons les gens s’habiller comme ils veulent. Je seconde pleinement la ministre Diane Lebouthillier sur ce point.

  4. Peintre Inspirée said

    Je tiens à vous dire que bien que je n’endosse pas votre propos dans son entièreté, je suis complètement d’accord avec l’idée que ce projet de loi est une mascarade ethnocentrique et polarisante dans le sens le plus négatif du terme. Votre argument sur la charte québécoise est fautif. Il ne soulève qu’une objection idéologique et non juridique. La charte québecoise est une loi ordinaire comme la loi que le projet de loi 21 risque de devenir. N’ayant aucun statut constitutionnel elle ne jouit pas de la doctrine de prépondérance attribuée à un document constitutionnel comme la Charte canadienne (qui a en effet le défaut de contenir une clause dérogatoire). Ceci dit, je ne serais pas surprise qu’un jour des juristes méthodiques argumentent que la clause dérogatoire devrait être tempérée par le test de l’article 1 de la Charte canadienne qui, lui, prévoit que certaines distinctions peuvent être acceptables même si elles rencontrent la définition de discrimination sous l’article 15 si on peut démontrer qu’elles sont justifiables dans une société libre et démocratique. A contrario, il vaudrait la peine de se demander si une mesure protégée par une clause nonobstant devrait/pourrait être soumise à un test de légitimité dans une société libre et démocratique. Quant on abuse des protections, on ouvre la porte à la possibilité que nos tribunaux leurs attribue des balises, le test de l’article 1 pourrait être une avenue. Merci de votre attention. 🙂

    [Merci, Peintre Inspirée de cette information très utile. J’ai basé mon information idéologique (pour reprendre votre mot) sur une remarque de Jagmeet Singh à Tout le monde en parle qui avait mentionné les deux chartes des droits. Je ne serais quand même pas surpris que des contestations juridiques s’appuient sur la charte québécoise, une loi ordinaire restant une loi… inévitable, comme les feux rouges. Enfin, on verra bien. Encore merci pour vos observations. — Ysengrimus]

    • Denis LeHire said

      @Peintre Inspirée. Deux réponses à votre intéressant développement.

      1- La charte québécoise des droits peut parfaitement faire l’objet d’une interprétation dans la contestation d’une loi comme la loi 21. L’absence de doctrine de prépondérance ne rend pas cette loi locale automatiquement inopérante, elle en fait juste le second meilleur choix si le premier choix n’est plus disponible pour cause de dérogation. L’erreur du raisonnement d’Ysengrimus ici —et elle est fatale— c’est plutôt que LA CHARTE QUÉBECOISE DES DROITS EST ELLE AUSSI DOTÉE D’UNE CLAUSE DÉROGATOIRE. Ce qu’il faudrait savoir maintenant est si le législateur a activé les DEUX clauses dérogatoires des deux chartes dans le projet de loi 21. On peut supposer que oui. Mais même s’il ne l’a pas fait, le problème restera entier pour les plaignants s’ils misent sur se contenter d’une interprétation de la charte québécoise. En effet, le gouvernement pourra activer la clause dérogatoire québécoise au moment de la plainte et le tout traînera en longueur pour tout le monde (ce qui avantage le gouvernement qui pense surtout à ses ré-élections sur la base à court terme de la rencontre de ses promesses électorales).

      2. Le second problème que vous soulevez est fort passionnant. Le travail de juriste que vous décrivez méticuleusement donne un peu le vertige car, avouons-le, il mènerait à rien d’autre qu’une abolition de facto de la clause dérogatoire de la charte canadienne des droits et libertés. Juridiquement logique (en ce sens qu’il est ouvertement paradoxal, et même immoral, de pouvoir déroger d’une charte fondamentale… cela correspond, assez cyniquement, à la nier, par principe), ce choix serait-il politiquement viable? Mourant, le nationalisme québécois s’en trouverait certainement réactivé. Je crois ici que la logique juridique ne passerait pas la rampe politique. Un ou une autre ministre de la justice se ferait changer de ministère s’il ou elle collait à cette idée toute en rectitude. Ce qu’il faudrait, en fait, ce serait un mécanisme graduel et gradué (plus mou, plus common law) qui permettrait d’invalider la clause dérogatoire, sur le terrain, au moment de l’interprétation des cas spécifiques (établissement de jurisprudences coutumières au cas par cas) tout en la maintenant intacte dans son principe. C’est ce qui va arriver, je pense… mais sur trente ans.

    • Sophie Sulphure said

      Mais Madame Peintre Inspirée, sans Clause Dérogatoire, comment assurez-vous la protection du français au Québec?

  5. Vernoux said

    Le Maroc est un pays où 90% des habitants sont de religion musulmane. Voici trois faits surprenant le concernant.

    Au Maroc, tous les policiers portent sans exception l’uniforme de policier. Aucun voile, turban ou signe religieux n’est visible.

    Au Maroc, les gens qui ont des emplois tertiaires dans le secteur touristique (guides de montagnes, chameliers, chauffeurs, serveurs…) cumulent leurs prières de la journée pour les faire après le travail, et cela s’ils ont le temps. Ce moment est entre Allah et eux.

    Au Maroc, dans la grande ville universitaire et touristique d’Agadir, toutes les femmes qui veulent travailler dans l’hôtellerie doivent enlever leur voile. Aucun signe religieux n’est autorisé aux employés, qu’ils soient hommes ou femmes.

    Cela porte à réfléchir. Pourquoi dans notre pays aux origine chrétiennes, qui se veut principalement laïc, devons nous composer avec ces enjeux qui ne sont même pas permis dans ce pays musulman?

    [Le Maroc est aussi une monarchie, un pays discrètement mais fermement autoritaire. C’est aussi, en même temps, un ancien pays colonial docile qui ne veut pas déplaire à ses clientèles occidentales. Mes critères d’inclusion des populations immigrantes sont ceux du Québec, pas ceux du Maroc. Si le Maroc est si merveilleux, pourquoi les gens en émigrent-ils? En bon joual pour qu’on se comprenne bien: c’est pas le Maroc qui va me caller mes shots sur des questions aussi sensibles, que j’entends régler à ma manière (qui n’est pas celle de la CAQ-distraire-pour-polluer non plus)… — Ysengrimus]

    • Abdoul Salim said

      Quand le roi du Maroc organise, implicitement ou explicitement, le travail de ses sujets ainsi, il opère pleinement comme une autorité musulmane. Il est une vraie figure d’autorité, lui, pour ses concitoyens. Le roi a un statut d’autorité religieuse, sa volonté correspond grosso modo à celle d’un grand imam. Quand le Maroc fait le genre d’ajustement autoritaire décrit ici, c’est à l’interne, si on peut dire. Les musulmans sont entre eux, l’effort est mutuel et, au bout du compte, consenti.

      Le contexte est totalement différent dans un pays occidental qui accueille des immigrants. Les occidentaux sont pluralistes. Ils le sont authentiquement. C’est une de leurs grandes qualités humaine et sociale. Et voici qu’ils débattent entre eux sur la méthodologie adéquate que doit adopter ce pluralisme. C’est une situation complètement différente. On accueille des gens venus d’ailleurs avec une autre culture.

      Ysengrimus a un point quand il dit que vous ne devez pas vous rabaisser (bien noter ce mot) au niveau des pays autoritaires que nous avons quittés. Vous valez mieux que ça. Protégez le multiculturalisme canadien et québécois. Ne le dévoyez pas, ne le détruisez pas par dépit, mécompréhension, frustration ou colère. Il fait partie de la leçon de générosité et de courage tranquille que vous donnez au monde… Moyen-Orient inclus…

      Nous vous devons beaucoup. Restez vous-mêmes, accueillants et serein dans votre culture.

      • Marie Verne said

        Abdoul Salim, vous me faite réaliser ce qu’on est en train de perdre de nous-mêmes avec cette loi. Je suis atterrée.

        Vous valez mieux que ça. Protégez le multiculturalisme canadien et québécois. Ne le dévoyez pas, ne le détruisez pas par dépit, mécompréhension, frustration ou colère. Il fait partie de la leçon de générosité et de courage tranquille que vous donnez au monde… Moyen-Orient inclus…

        On s’enfonce lentement dans l’irrationnel et le xénophobe.

  6. Laurence Juneau said

    Et vlan d’un bord et vlan en avant encore et encore comme en écho de l’adoption de la loi 101. Non J’arrête là la lecture. Mais voici une anecdote. Ce n’est pas une question d’identité, c’est une question de justice. À l’été 2012, je me suis retrouvée à Vienne. À l’hôtel, il y avait un groupe de personnes dont trois femmes, trois hommes et quatre enfants. Avec quelle vive émotion j’ai vu ces femmes en niqab! Des fantômes vivants. Ce rappel m’émeut encore. Pensez-vous que je vivais là un réflexe identitaire? Pas du tout. Je voyais ces hommes en tenue plutôt légère, ces femmes tout en noir, je me disais quelle injustice!

    [C’en est une. Je vous seconde pleinement sur ce point. Notre question collective c’est: comment faire pour résorber cette injustice? Pas par la loi 21, à mon sens… Avec la loi 21, on se comporte comme eux mais en tirant dans l’autre sens. On perd complètement l’occasion de prendre la hauteur civilisationnelle requise. — Ysengrimus]

    • Amina Amicale said

      Je pense, en tout respect, que vous viviez un réflexe identitaire, oui, absolument. Pas celui que vous pensez, par contre. Vous viviez le réflexe de la condescendance occidentale. Vous vouliez sauver cette femme voilée malgré elle, alors qu’elle n’est tout simplement pas prête pour se faire imposer votre vision du monde.

      je ne porte pas le voile mais ma mère et ma grand-mère le portent. Décisions personnelles dans les trois cas. Personne ne nous a dicté nos comportements. L’autorité qui doit décider sur ces choses corporelles est une autorité intérieure et féminine. Et moi, je ne tenterais jamais de sauver ma mère et ma grand-mère malgré elles. Comment osez-vous, vous, envisager de le faire, touriste dans un pays dont vous ne savez rien, envers une femme dont vous ignorez tout. Je ne comprends pas ce dogmatisme occidental si fier de soi.

      Respectons le rythme de chacun. Comme dit Ysengrimus, n’arrachons pas les voiles, laissons-les tomber par eux-mêmes, tout doucement, plus doucement.

      • Val said

        C’est ça. Je suis d’accord. Ce complexe du «sauveur-occidental» n’est pas du tout utile. Il faut questionner cette réaction car elle est très dangereuse. De quoi d’autre est-ce qu’on va «sauver» les gens qui sont différents de nous? Il faut s’écouter, pas juste regarder et juger. La justice va émerger avec la communication et la compréhension.

      • Amina Amicale said

        COMPLEXE DU SAUVEUR OCCIDENTAL. voilà, exactement, bien dit!

        Vous êtes du Moyen-Orient, Val?

        Moi, je suis une chiite libanaise (non pratiquante, non voilée, mais conscientisée).

      • Val said

        Merci, Amina! Pourtant, je ne peux pas m’en attribuer le mérite. Ça vient du «white saviour complex», en anglais.

        Je suis canadienne, malaysienne-chinoise de souche. Enchantée de faire votre connaissance, et de vous lire. Vos commentaires me font toujours réfléchir et apprendre.

      • Amina Amicale said

        Val, Amina, même combat!

  7. Marc Pageau said

    Ceci n’est pas une loi raciste. Ça fait plusieurs dizaines d’années que le gouvernement québécois nous a demandé de ne pas porter de signes religieux dans les lieux publics. Arrivent des gens de d’autres pays qui veulent supposément s’intégrer parmi nous et qui refusent nos lois. La question est pourquoi devrions-nous accorder à ces gens, qui disent vouloir vivre dans notre pays, ce que nous les québécois avons laissé tomber? Les religieux et religieuses se sont habillés en laïques pour se conformer à la loi alors pourquoi pas les nouveaux arrivants? En quoi doivent-ils être au-dessus de nos lois? Qui sont-ils pour être supérieurs à nous? Où est le racisme? Cette loi de signes religieux existe depuis les années 1970. Ce n’est pas une nouvelle loi. Ce qui est demandé, c’est que tout le monde doive s’y conformer.

    [Vous devriez maintenant lire le texte. Des réponses aux questions que vous soulevez y sont proposées. — Ysengrimus]

    • Serge Morin said

      Vous parlez, monsieur, d’une vieille loi laïcarde québécoise qui n’existe tout simplement pas. Aucune loi n’a jamais contraint les religieux et religieuses du Québec à tomber l’uniforme. Ils l’ont fait dans la mouvance de Vatican II des années 1960-1970. Ce fut leur choix entièrement.

      J’ajoute, en plus, que le voile moyen-oriental n’est pas un uniforme religieux. Faut pas tout confondre et tout mélanger là…

  8. Cymbale said

    Les voici, déjà bien remonté(e)s pour garder leurs voiles et leurs turbans… et ce, à cause de nous, de nos lois idiotes.

    C’est bien foutu maintenant. Ils ne l’enlèveront plus.

    • Sismondi said

      Ils sont en train de transformer une gang de mononcles et de matantes qui ne demandaient rien à personne en militants organisés et déterminés.

      Faut vouloir gouverner en polarisant et en foutant le trouble. Maudits gouvernants incompétents.

  9. Mamoun Mrabet said

    Bienvenue dans un gouvernement qui se dit laïc, qui veux interdire les signes religieux visibles dans la fonction publique… mais qui fête toujours Noël, qui décore toujours ses locaux publics à Noël… et qui paye même les vacances des fêtes! Elle est où la logique et la cohérence? Moi j’adôöre Noël et le beau vivre ensemble.

    • Tuquon Bleu said

      C’est pas le droit au sapin qui est en trop, pauvre toué, c’est le droit aux voiles et aux turbans qui manque.

      Le seul sapin dans c’t’histoire, c’est celui que le gouvernement est en train de nous passer…

  10. Youplaboum Demars said

    Tiens donc ils copient la France dont la loi a été appliquée trois jours (juste pour les médias).

    • Casimir Fluet said

      Liberté (sauf sans papiers), Égalité (sauf en Françafrique), Fraternité (sauf quand tu portes un voile)…

      (chacun son style dans la dérogation)

  11. Yon Berpoch said

    Ta religion, c’est comme ta bite, tu peux en être fier mais tu ne la montres pas dans la rue! De plus, le voile est un signe de soumission de la femme. Pourquoi les hommes ne sont-ils jamais les victimes de ce genre d’inepties moyenâgeuses!

    • Fatima La Nuit said

      En effet, ta religion, c’est comme ta bite, tu devrais soigneusement te la fourrer quelque part avant d’en parler.

      Cette lassante histoire du voile comme signe de soumission, as-tu remarqué que tout le monde la relaie sauf les femmes voilées (quand on les laisse parler). Le slogan des femmes voilées qui vivent en Occident, c’est bien plutôt: C’EST PAS PARCE QUE JE SUIS VOILÉE QUE JE SUIS SOUMISE

      Aussi, notamment au Canada, les hommes sikhs subissent des pressions analogues. Voilà pour l’autre faille de ton raisonnement.

      Merci à Ysengrimus pour cet excellent édito. Je me sens bien sur ce blogue et c’est pour des textes comme celui-là. Par contre, je ne sortirai pas de ma nuit tant que des Yon Berpoch séviront sur le net…

      • Égérie said

        En effet, ta religion, c’est comme ta bite, tu devrais soigneusement te la fourrer quelque part avant d’en parler.

        Je seconde, Fatima la Nuit, je seconde À FOND

  12. Pablo Lugo Herrera said

    Pour moi, c’est normal cette chicane… On est une Société analphabète à 54%! Cette loi, par contre, je ne l’appellerais pas raciste, mais peureuse… L’ignorance amène la peur!

    • Le Boulé du Village said

      À la peur se joint aussi la volonté nette de diviser la population. La Commission Bouchard-Taylor n’incluait pas les enseignantes parmi les figures dites d’autorité. Appliquer la loi aux figures d’autorité selon le rapport Bouchard-Taylor, ça aurait concerné six gugus. Il en fallait plus, il fallait que ça chicane plus fort. Le gouvernement a donc inclu les enseignantes de primaire et de secondaire, certain qu’il était de faire un bon coup de filet de femmes voilées en trichant ainsi avec Bouchard-Taylor.

      Il faut une grosse chicane bien bruyante pour dissimuler les autres éléments de l’agenda politique. Le même truc que Jean Charest a déployé pendant la crise étudiante de 2012 (pour couvrir ses autres malversations).

  13. Camarade said

    Ce n’est pas en interdisant dans le public qu’on empêche d’imposer dans le privé. Au contraire, on enferme dans le privé et ça devient encore plus grave.

    Et pourquoi ce compromis ne concerne-t-il que les musulmanes et les sikhs? Pourquoi assimile-t-on tous les musulmans à des immigrants? Pourquoi une pièce de vêtement dont l’usage est culturel est-il considéré comme religieux? Il faut lire l’autre excellent texte de Paul Laurendeau UNE FOIS POUR TOUTE, LE VOILE N’EST PAS UN SIGNE RELIGIEUX.

  14. Sissi Cigale said

    Moi, mon meilleur argument de réflexion autocritique, en tant que femme, sur cette question lancinante, c’est ceci:

    niqab-cartoon

    La femme en bikini: Tout est couvert sauf les yeux, quelle culture cruellement phallocrate.
    La femme voilée: Rien n’est couvert sauf les yeux, quelle culture cruellement phallocrate.

  15. Catoito said

    Hum… Personne ne semble vraiment prendre la mesure de la vive radicalité du texte d’Ysengrimus. Je vais donc y aller d’un de mes petits résumés.

    1- les figures d’autorités de l’ordre établi, rien à foutre. On semble se comporter comme si on manœuvrait une populace de moutons avec cette notion. Et les moutons ont peur du bout de chiffon.

    2- le voile n’est pas un signe religieux et cette loi ignare de toutes façons prouve son incurie et sa bêtise autour de la notion même de signe religieux. Cette loi ne connaît rien aux religions.

    3- le laxisme du colonialisme canadien n’est pas en cause. C’est bien de xénophobie québécoise bien de chez nous qu’il s’agit ici, sans plus.

    4- il aurait fallu attendre que les femmes voilées prennent leur distance face à leur culture par elles-mêmes, sans les forcer autoritairement. Ce rendez-vous respectueux est raté. Maintenant ce sera la polarisation, le braquage, la logique de martyrs, la crispation religionnaire, la merde.

    5- une vraie laïcité détruirait et démantèlerait toute l’école confessionnelle, sans tergiverser. On ne fait pas cela du tout, utilisant plutôt la notion tout usage de laïcité comme gadget pour harceler les communautés ethniques.

    6- le capitalisme, que visiblement ce gouvernement sert veulement, raffole des conflits sociétaux qui distraient les masses, divisent le prolétariat et retardent l’échéance de la lutte des classes.

    Moi je dis: synthèse géniale.

    • Val said

      J`apprécie spécialement la réflexion sur l`autorité et les figures d`autorités. Ça m’aide à faire la distinction importante entre le pouvoir sociétal et l’autorité.

      • Catoito said

        Vous avez raison. Il est assez inquiétant de voir un projet de loi jongler comme ça avec l’idée d’autorité et de qui en sont les représentants. Je crois comprendre que vous avez un homme politique progressiste canadien qui porte un turban. En sa qualité d’homme politique et de député, est-il une figure d’autorité? La loi ne le stipule pourtant pas, si je comprends bien. Qu’en est-il donc alors de l’autorité politique?

        On est vraiment dans du grand n’importe quoi. C’est assez démoralisant, surtout venant du législateur d’un important pays francophone.

  16. Puma Freytag said

    Cet article demanderais un peu de temps pour être commenté sérieusement, c’est un discours confus, où l’amalgame est rhétorique et les niveaux d’analyse historico-sociologique peu rigoureux. Un discours très adolescent comme nous en faisions dans notre jeunesse anarchiste… mais pas très marxiste sur le plan de la rigueur scientifique. Il montre une grande méconnaissance de la sociologie musulmane, surtout celle des bédouins d’Arabie… bref, pas très convaincant et un peu trop engagé dans une polémique au ras des pâquerettes et des lieux commun. La pensée ne fera pas beaucoup d’avancées avec ce type de texte réducteur et démagogiquement polémique. Je pourrait reprendre chaque point… mais le courage me manque et mon doigt sur ma tablette est fatigué…

    [Laissez-moi deviner: il n’est pas d’accord avec le contenu mais affecte de critiquer le style ou le ton, C’est classique. Tenir d’office des propos superficiellement réprobatifs sur un discours, c’est toujours un peu se donner l’illusion bon marché de l’avoir dominé. Par contre, quand vient le moment de réfuter en méthode, là il a les doigts fatigués (pas juste les doigts, je pense). Ça aussi, c’est classique. — Ysengrimus]

    • Puma Freytag said

      Les femmes musulmanes sont libres de se vêtir comme elles le veulent, Nous leur demandons collectivement de respecter notre idéal de laïcité pour enseigner. Et cela est vrai, nous sommes les héritiers d’une histoire et d’une culture… Si elles ne peuvent faire cette concession, c’est que leur pensée intégriste ne veut pas respecter la collectivité dans laquelle elles ont choisie de vivre. Je ne vais pas enseigner tout nu, et pourtant ma philosophie hédoniste me demande de le faire. Les concessions sociales doivent se faire des deux côtés, de celui de l’individu et de celui des règles sociales choisies collectivement et démocratiquement. Et le chantage à l’emploi est le pire des arguments. Et non, nous ne pouvons pas toujours faire tout ce que nous voulons et j’aime trop mes petits enfants pour qu’une vrai laïcité ne soit pas observée à l’école. Et je ne suis pas un gros réactionnaire capitaliste de droite extrême. Il faut juste avoir le courage de ses opinions et défendre ses idéaux des Lumières et de luttes contre toutes les formes d’obscurantisme, la religion en étant un d’importance et il a pas fini de nous faire la vie dure. Les évangélistes ne sont pas loin non plus et leur vision du monde-création-idée est le mêmes que celui des salafistes politiques… Il faut continuer à débattre, s’écouter, répondre aux arguments, lire les textes, la Bible, le Coran les textes pâlis, etc et débusquer les impostures idéologiques. Le voile islamique a bien été analysé par des experts musulmans et non musulmans, et nous ne pouvons plus faire comme si cela ne participait pas d’une lutte idéologique. Une fois encore les femmes sont les otages. Il faut reprendre le concept coranique de l’oukase pour en comprendre les enjeux….

      [C’est bien ce que je disais, il n’est pas d’accord avec le texte… — Ysengrimus]

      • Val said

        Je pense à deux scenarios:

        1. une école publique où les enseignantes musulmanes ne doivent pas retirer leurs voiles, donc, il y en a qui le portent, et il y en a qui ne le portent pas. Les jeunes filles musulmanes voient les modèles à émuler qui se portent comme eux, qui partagent leurs cultures et leurs pratiques culturelles, et le plus important, elles vont voir aussi, qu’elles sont libres de faire les choix. Et les futures enseignantes dans cette salle de classe vont voir qu’elles aussi, peuvent réussir, qu’elles peuvent devenir, elles-mêmes les enseignantes.

        2. une école publique où les enseignantes musulmanes doivent retirer leurs voiles, donc, personne n’est voilée. Qu’est-ce que les jeunes filles musulmanes vont voir dans ce cas? Qu’il est possible de devenir enseignante, mais qu’il faut s’intégrer au point de renoncer aux choix vestimentaires? Qu’elles peuvent réussir seulement en se conformant à la culture dominante? C’est ça la vraie laïcité?

        J’utilise le voile dans ce cas parce qu’il est mentionné dans le commentaire au-dessus, mais, ces scenarios peuvent se référer à toutes sortes de situations. C’est quoi le message qu’on donne à nos enfants si cette loi est passée?

      • Julie Soulange said

        Voilà. Pluralisme rationnel méthodique VERSUS autoritarisme crypto-ethnocentriste.

        Il semble bien que le choix que vous décrivez, Val, soit en train de nous être soutiré… par la loi, en plus.

  17. Tourelou said

    Mon humble avis.
    Je crois que la politique ne doit pas se mêler du pouvoir religieux. Imaginez j’ai retrouvé une « ode » à la révolution parut dans la Gazette de Québec le 8 janvier 1790.

    Avec ardeur tu défendras
    La liberté dès à présent,
    Du Clergé tu supprimeras
    La moitié nécessairement.
    Au gens de lois tu couperas
    Les ongles radicalement (…)

    Au Québec, ça date de plus de deux cents ans de discussions sur trois simples principes:
    – Liberté e conscience
    – Égalité des citoyens
    – Cohésion sociale (mêmes lois, mêmes institutions, mêmes lieux publiques)…

    Je sais, agir dans un esprit de respect et de solidarité, me donne droit au titre de rêveuse🌹car un jour viendra…

  18. Sam said

    Dans le mille Ysengrimus!

    Le contraire m’aurait étonné de vous! Le jour où j’ai vu la première manif des voilées aux infos déjà du temps de Pauline Marois durant l’épisode de la charte des valeurs québécoises, et plus récemment, la dernière manif de voilées d’il y a quelques jours, avec un type comme Adil Charkaoui, et d’autres barbus tenant un discours politique devant une marée humaine de manifestantes, j’ai compris que ce Québec a tout fait pour perdre son pari de l’intégration, si pari il y a eu en vérité… car il n’en a jamais été question au fond puisque le parti Québécois de Marois et de Drainville n’ont jamais souhaité qu’il y ait intégration de quiconque. Au contraire, ils ont milité, et empoisonné la vie de tout le monde, utilisé les moyens les plus vils en politique non pas pour intégrer les immigrants, mais pour se dissocier d’eux! Et tout ce qu’ils ont réussi à entreprendre et graver dans les esprits de mémorable est de dépeindre et renforcer l’idée qu’il y ait un Québec Tutsi, aux prises avec un Québec Hutu! Un Québec Tutsi, selon eux, en danger d’extermination face à ‘’l’invasion’’ et ‘’au grand remplacement’’ comme dirait l’autre… Pourquoi tout ça en fait?! Pour l’ivresse du pouvoir, pour arriver à gouverner coûte que coûte en fait, pour être aux commandes et s’assurer de se remplir les poches, et remplir celles de nos ‘’ptits amis’’… et plonger ce Québec dans une autre sclérose socio-économique qui n’a pas de nom, comme si celle qu’on vit ne suffisait pas! Plus tard, et dans la même logique templière de croisade pour le pouvoir, La CAQ se verra portée au pouvoir par un cadeau inespéré et héritera de cette noble cause Tutsie! N’importe quoi! Une balkanisation en marche qui n’augure rien de bon, sauf à creuser le lit des extrémismes de tous poils, y compris islamistes au Québec, car il n’y en a jamais eu auparavant, en passant par l’épisode de la tuerie de la mosquée, perpétrée par un jeune étudiant tout à fait innocent mais paumé, perdu, et largement manipulé, chez qui ils ont assassiné l’humanisme élémentaire avant qu’il n’assassine quiconque, lui le Québécois paisible au visage angélique et enfantin, était à mille lieux de se retrouver dans un carnage perpétré par des adultes en fait, avant le sien… Et pendant que lui croupit en taule, sans doute ne croyant toujours pas à son acte, et que ses victimes ruminent leur chagrin, les véritables assassins sont libres, heureux, fiers, et n’ont pas perdu un gramme de leur pouvoir de nuisance, ni que leur égo ait souffert la moindre brimade…

    Legault n’est pas Marois certes, un océan les sépare, dans le parcours comme dans la personnalité, mais que voulez-vous, la moindre des choses serait qu’il honore le ‘’contrat’’! car il s’agit bien de transactions dont on parle ici, et non pas de contrat social renouvelé! En termes de commerce, cela s’appelle ‘’l’échange de marchandises’’, c’est d’ailleurs une tendance mondiale en politique aujourd’hui! Tu me mets au pouvoir, et je réalise tes souhaits en retour! On ne va tout de même pas se gêner! C’est pas des immigrants, ou immigrantes voilées de surcroît qui vont nous en empêcher, c’est à peine si elles existent! Tenez, regardez les vivre entassés dans les ghettos de Montréal, comme des cafards, ils se cotisent pour louer un local et en faire une mosquée, leur condition sociale est déplorable, leur garçons commencent à se comporter comme les voyous des banlieues françaises, et nos prisons en sont pleines déjà, et une partie de leur filles se voilent ou se prostituent, c’est sur la bonne voie! C’est en effet le résultat pour lequel des politiciens sans scrupules et des médias poubelles ont longuement travaillé et œuvrent encore d’arrache pied! Il faut qu’ils créent des ghettos, qu’ils y vivent, et qu’ils y multiplient des mosquées, des comptoirs de deals de drogues, des commerces ethniques et des îlots de pauvreté tout comme en France! Bien que nous n’ayons rien à voir avec la France sur le plan colonial et historique récent, il faut importer ce modèle Français coûte que coûte, ne serait-ce que pour nous différencier du modèle anglophone des autres provinces comme Toronto, ici ça sera Made in France, et cette histoire on ne l’explique pas assez, et j’y viens!

    Si vous voulez mon avis, René Lévesque a commencé cette course à l’imitation de la France post-coloniale, en prenant ce modèle comme base institutionnelle et sociale. Le bonhomme pensait bien faire, et beaucoup de Québécois pensent encore que ce qu’il a accompli relève du miracle, alors que ce ne fut rien d’autre qu’un modèle calqué sur les colonies françaises ou la France post-coloniale adapté au Québec et même pas un modèle d’une France dans ce qu’elle possède de plus humaniste et rigoureux! Très tôt, l’intégration au sein du parti Québécois de mouvances idéologiques multiples à fait que des gens militaient pour un parti auquel ils ne croyaient pas vraiment, le RIN de Pierre Bourgault en est un exemple, des politiciens pressés et une course identitaire, souverainiste, souvent paradoxale suffira à faire monter les enchères de qui est plus patriote, plus identitaire, plus représentatif de l’idéal Québécoise! Bref, sans le savoir, le Parti Québécois se chargera d’institutionnaliser les pratiques économiques de cette France post-coloniale, et développera une mentalité de droite identitaire chez les québécois à mon humble avis! J’ai moi-même toujours dit que si j’étais Québécois, je serais probablement souverainiste, mais sûrement pas à la manière du Parti Québécois! Et si des Québécois veulent un témoin pur laine encore vivant et âgé de plus de 80 piges qui leur donne sa version des faits, je suis prêt à leur présenter Marcel, un vieux bonhomme aigri qui un jour explose dans ma face sans que je lui ai rien demandé, pour me raconter pourquoi il détestait Lévesque! Attention je ne suis pas un anti-Lévesque en racontant cette histoire, mais le vieux Marcel en a dépeint un portrait des plus sombres en le traitant d’alcolo, d’assassin, qui battait sa femme, et d’amateur de femmes en tous genres, car il aurait assisté entre autre justement au jour ou ivre mort selon lui, Lévesque aurait écrasé un sans-abri à trois heures du mat, et que les flics lui ont arrangé cette histoire pour dire qu’il était à jeun et que le sans-abris était étendu sur la chaussée au milieu de la route! Bref, j’ai compris que le bon vieux Marcel voulait simplement sympathiser avec moi pour la première fois ce jour-là! Et il pensait qu’il était nécessaire de relater la chose de cette façon! Car il s’était lancé dans un discours pour me dire que lui n’était pas raciste, que ‘’nous sommes comme du monde et pas des martiens’’ et que c’est à cause du PQ si on en est là! Je ne cache pas que j’ai éclaté de rire ce jour-là, et j’ai raconté cette histoire à un collègue Québécois… histoire de sortir du climat lourd instauré par Marois et Drainville!

    Tout ça pour dire que les Québécois de droite n’ont peut-être pas encore trouvé le politicien qui va leur rentrer dedans pour remettre en cause leur mentalité, une femme ou un mec solide qui leur balance à la figure que leur passé souverainiste était miné depuis le début et qu’il n’y aurait pu y avoir de souveraineté sans de véritables icônes d’une lutte véritablement démocratique, et une concertation nationale inclusive de tout le monde y compris des immigrants de tous poils! De la même manière, ce débat sur la laïcité aurait dû se faire dans la concertation véritable et dans le respect. Au lieu de s’asseoir avec le public ciblé par ses mesures de la loi 21, et avec les représentants de la droite identitaire la plus coriace sans les abandonner l’un face à l’autre par média poubelles interposées … bref, expliquer que l’on veut que ce soit un débat serein, apaisé, respectueux, et que nous soyons tous Québécois avant et après tout, et que cela soit non négociable, la CAQ décide de s’élever au-dessus de la mêlée, méprisant les premiers (les voilées) et rassurant les seconds (la droite) que nous allons prévaloir et qu’on va pratiquer la politique de la terre brûlée, imposer le fait accompli, alimenter la division, et sortir gagnant même s’il faut tordre le cou aux lois, et même s’il faut virer des enseignantes et des fonctionnaires! ‘’Nous les ferons ramper, et ils auront même pas le privilège que nous leur accordions une audience.’’ Nous, les généraux et légionnaires romains pur jus du Québec, nous sévirons et écraserons les barbares!’’ Et tant pis pour l’avenir, tant pis pour les mécontents, on est chez nous et on fait ce qu’on veut!

    L’un des discours dangereux qui prévaut justement chez cette droite identitaire québécoise est d’utiliser des raccourcis et toutes sortes de ‘’patentes’’ pour soutenir que les plus racistes en fait sont les ‘’multiculturalistes’’, que Pierre Elliott Trudeau en était un car il aurait parlé de ‘’frontières de sang’’, ou comme dans ce passage (Commençons avec son père. Voici deux citations de Pierre-Elliott Trudeau du numéro de la revue Cité libre de janvier-février 1997. Première citation: «Et c’est pour ça que je ne veux pas parler de deux nations, mais de deux langues. Pour moi, la langue est un instrument de communication que l’on peut acquérir avec un certain entraînement. Par contre les liens du sang, ou la «culture ancestrale» ne peuvent pas s’apprendre» (Page 11).) Bref, ils continuent de plus belle, que les premières nations l’auraient imité pour mettre dehors de leurs réserves des non-Mohawks, car ‘’on ne devient pas Mohawk, on l’est ou on l’est pas’’, que le Trudeau fils est aussi raciste que son père par on ne sait quel nombre de citations, que ‘’le multiculturalisme est un racisme qui s’ignore et qui se prend pour un antiracisme, alors que c’est le véritable racisme contrairement à la droite qui chercherait à intégrer les immigrants de force, et en faire de vrais québécois!’’ Bref, on est pas sorti de l’auberge car tout ce que compte le Québec aujourd’hui comme mouvances d’extrême-droite répète les mêmes sottises jusqu’à la nausée, sans parler des attaques contre des femmes qui ont osé exprimer une opinion différente, Sheila Copps ou Valérie Plante aujourd’hui! Très bien tout ça, alors que proposez-vous au-delà de toutes ces chartes et ces discours, que voulez-vous? ‘’on veut plus d’immigrants, et ceux avec qui on est pris, on veut les assimiler.’’ Super beau programme en effet, tant qu’à y être pourquoi ne pas remplir des wagons de trains par les récalcitrants et les déporter en Ontario! Tiens donc!

    Cher Ysengrimus, vous pourriez ne pas être d’accord avec moi, mais moi en tous cas, j’ai découvert en vos appels une force et une intelligence qui sont rares et indispensables pour ce pauvre Québec et pas seulement pour ce Québec. Certes, vous n’êtes pas le seul à comprendre, vous opposer et tenter d’expliquer les erreurs que font ces âmes égarées du Québec pour moult raisons et sous différents prétextes, mais pour l’ensemble de vos écrit et vos positions sur de nombreux sujets, vous demeurez à mes yeux un véritable Québécois, un héros digne d’en porter le nom, et un esprit noble à qui ils auraient dû confié la mission de remodeler l’Assemblée Nationale, redéfinir ses objectifs, et chapeauter un nouveau processus d’intégration politique, sociale et académique dans ce Québec qu’on commence à perdre de vue! Et je pèse mes mots! Et tant pis pour les aigris, les parvenus petits bourgeois incertains et affamés qui pullulent dans la sphère politique et médiatique! Bref, Je vous aime Ysengrimus!

    Avec tous mon respect, camarade!

    [Merci pour vos bons mots, Sam. — Ysengrimus]

  19. France Saulnier Puglisi said

    Comment se fait-il que dans plusieurs pays arabes les femmes ne portent pas de voiles ou autres, Maroc, Égypte, Tunisie, etc… Et elles travaillent sans aucun signe religieux? Pourquoi ici dans un pays d’accueil laïc elles veulent absolument le porter tout en sachant l’histoire et l’évolution de ce pays. Si se n’est pas pour provoquer, c’est quoi?

    [Beaucoup d’anglo-canadiens disent, de bonne foi, que les québécois, minoritaires au Canada, s’entêtent (leur mot) à parler français pour provoquer. Que leur répondez-vous? — Ysengrimus]

  20. Le Boulé du Village said

    Pour le moment, l’ethnocentrisme est en place…


    .
    .

  21. Ysengrimus said

    Je suis très proche de l’analyse de ce juriste (Pierre Bosset). SURTOUT sur la définition de la laïcité. Excellente analyse…

    Aussi, il est rarissime que des figures publiques conventionnelles expriment verbatim mon opinion sur une question. Ici Monsieur Bouchard y arrive à 98%. Satisfecit. La voix de l’analyse adéquate et pertinente de cette question lassante.

    LAÏCITÉ: «ON N’A PAS L’AIR D’UNE SOCIÉTÉ DÉCENTE», DIT GÉRARD BOUCHARD

  22. Serge Morin said

    La mairesse de Montréal, Valérie Plante, analysant la catastrophe et se crêpant avec le robot livide, Simon Jolin-Barrette, ministre de l’immigration, qui pilote la Loi 21.

  23. Greg Durable said

    L’enfer ethnocentriste tranquille est instauré. Pitoyable.

    .

    Et pourtant je donne raison aux adversaires du voile. Insoluble:

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