Le Carnet d'Ysengrimus

Ysengrimus le loup grogne sur le monde. Il faut refaire la vie et un jour viendra…

  • Paul Laurendeau

  • Intendance

Claude Gauvreau: l’Épormyable

Posted by Ysengrimus sur 19 août 2015

Claude Gauvreau

Il est facile d’accepter Claude Gauvreau et
de se décider à être SOI

Janou Saint-Denis (1978, p. 194)

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Il y a quatre-vingt dix ans tout juste naissait à Montréal le poète Claude Gauvreau (1925-1971). Ce fut un casse-pieds indubitable doté d’un talent verbal et cabotinal incroyablement envoûtant. Il suscita, en son temps, les contre (ses lectures de poésies étaient souvent abruptement claquées) et les pour. Au nombre des pour figura, en bonne place, la dramaturge et poétesse Janou Saint-Denis (1930-2000), une inconditionnelle de Gauvreau et pas la première venue elle non plus. Elle oeuvra sans relâche, notamment par des séances de lecture de poésie, dans les années 1970, sur la mythique rue Saint-Denis à Montréal, à perpétuer la mémoire de l’Épormyable. Claude Gauvreau se suicida en 1971 par défenestration (on le retrouva empalé sur une grille, au pied de l’immeuble où il bossait sur un script de film). Cela contribua assez malencontreusement à la mise en place de sa légende mondaine, un peu affadie aujourd’hui au demeurant. Janou Saint-Denis ne se gêne d’ailleurs pas pour tapageusement nous servir le brouet sacralisant du poète maudit mécompris, à propos de Gauvreau. On se met en frais de nous annoncer une fausseté factuelle, qui était déjà une ritournelle creuse du temps de François Villon, j’ai nommé l’atermoiement selon lequel la masse n’aurait pas accès à la poésie:

la masse ignore la poésie et les poètes
on ne peut la blâmer
les quelques poèmes lus
au hasard d’une scolarité
plus ou moins efficace
sont loin d’être suffisants
comment créer un  entendement réel
entre l’individu et le poète
quand l’énergie créatrice est sapée
par toutes sortes de propagandes
à la mode du jour

[…]

le poète est un être habité
dangereux
qui nuit aux cadres établis
de n’importe laquelle des sociétés étroitement structurées…
le poète fait chambranler bien des murs
il n’obéit pas à une masse…
ni n’impose une dictature
ou autre discipline forcenée…
il est un témoin et non un propagandiste…
le poète est un IMMENSE PROVOCATEUR
qui abolit les portes murs barreaux plafonds planchers
il est l’instigateur de la GRANDE OUVERTURE
secouant les ombres
il attire les passions
joue avec la lumière
met à jour les cellules cérébrales
endormies dans la sclérose
et suspend le chatouillement du nombril
devenu pour plusieurs leur unique préoccupation

(Janou Saint-Denis 1978, pp. 135 et 171)

Blablablabla, cliché… Parlons donc du nombril des autres à travers le relais amplificateur du nôtre… Ah, cette vieille lune du bobo-clerc larmoyant, selon laquelle parce que vous ne lisez pas MES poèmes, vous êtes des sclérosés endormis qui n’ont pas accès à la Poésie… Il va sans dire que, dans la vision qu’en promeut Janou Saint-Denis et bien d’autres de nos chantres contrits du poétisme-élitisme, Claude Gauvreau (que d’aucuns surnommèrent, un tout petit peu perfidement, le mythocrate) est la victime intégrale et déchiquébarouettécontenancée de ce mépris sociologique brunâtre, générique et acide envers le Poète. Ici c’est Claude Gauvreau lui-même qui parle de lui-même à la troisième personne en fustigeant les caves (bien caves, réacs et ignares, au demeurant, là n’est pas la question) qui l’emmerdèrent et l’encombrèrent dans l’échafaudagefistolagechambranlage de son fabuleu-neu-neu-meuh mythe:

Il fut un temps (et ça peut être utile encore) où il suffisait de décocher quelque petite saligauderie bien sucrée, de perfidie persifleuse à l’adresse de Paul-Émile Borduas ou de Claude Gauvreau ou de l’automatisme en général pour se voir aussitôt octroyer du galon par les sommets de la vieille hiérarchie bien installée dans le statut quo. Et il semble que, même de nos jours, alors que l’automatisme n’a plus pour le représenter sans le gauchir et tâcher de le pâlir que quelques minimes énergies réputées désarmées, le vieux procédé soit encore employé fréquemment et qu’il donne auprès de la non vieille extrême-droite esthétique, en dépit de toute vraisemblance, toujours un rendement considérable surprenant en matière d’arrivisme sans rêvasserie encombrante réussie.

(Claude Gauvreau, Réflexions d’un dramaturge débutant, 1970, cité dans Saint-Denis 1978, p. 241)

Barbé à la planche par ce type de développement rebattu sur la poésie objet-de-mépris et sur le poète-victime-des-saligauds, je réponds à ce genre de thuriféraire pâmé(e) (dont Madame Saint-Denis n’est qu’un exemple parmi tant d’autres) et de dictateur-non-je-ne-dicte-rien-mais… montreur des bons et des méchants ès Arts (dont Gauvreau, dans ses pulsions autobiographes, chant-du-CYGNEuses et proto-suicidantes, est un exemple ardemment cuisant) juste ceci. J’ai pas besoin de ce genre de ratafia-fardoche-effiloche pour aller chercher MON Claude Gauvreau. Gauvreau l’écrivain automatiste, Gauvreau le théâtreux tonitruant, Gauvreau le flaflatuvesseux de mots. J’en veux, j’en savoure, j’en absorbe, j’en jouis et je m’en réclame. Je suis un verbeux post-gauvreaulogique et je m’assume dans toute la protubérance que cela engage, je ne vous dirai pas jusqu’aux tréfonds d’où:

Claude Gauvreau: gros

Claude Gauvreau était gros.
C’était un gros, Gauvreau, un taureau.
Il défonçait des portes, tête baissée,
Genre bélier,
En gueulant comme un diable.
C’est lui qui la donnait,
La susdite charge de l’orignal épormyable.
Et les huis éclataient.
Et son Lui s’éclatait.

Claude Gauvreau, c’était gros.
C’était verbal, c’était torrentiel.
Ça montait à l’assaut du ciel
Peinturluré bleu poudre dans le plafond théâtral
De je ne sais quelle salle paroissiale
Inévitablement, implacablement provinciale.
Ça gueulait, Gauvreau.
Ça vomissait, ça vombrissai.
Ça cacophonisait à larges brasses
C‘était tu gros!
Et plus c’est gros, plus ça passe.

Gauvreau, c’est niché ici.
Ça s’agglutine solide au tapon de mon parti pris.
Gauvreau c’est gros, ça fonce dans la danse
En se faisant
Ostentatoirement
Citer au nombre de mes influences.
Hénaurme poésie qui se crie et fait plus.
En ce sens qu’elle s’extirpe aussi de nos anus.
Et pas discrètement
Mais impitoyablement.
Comme disait Latraverse: un autobus.

Gauvreau gros, est ici, l’animal.
Tenez-vous le pour dit.
Honni soit qui mal y chie.
On a des oranges vertes sur nos étals.

(tiré de mon recueil L’Hélicoïdal inversé, 2013)

J’expurge ouvertement et sciemment mon limpide agacement face à ces artistes hyper-égomanes (genre Bataille, Artaud, Robbe-Grillet, Gauvreau) qui bizounent ouvertement leur œuvre (d’autre part habituellement importante) en voulant convulsionnairement perpétuer, à leur strict bénéfice, ce sacré Sacré dont on avait pourtant si fermement dépouillé la prêtraille malodorante et réfractaire. Voilà qui est dit et ne se dédie… Maintenant, totalement à la décharge de Janou Saint-Denis, et déférence obligée pour l’originalité de son témoignage, il faut s’aviser du fait qu’un certain nombre de ses observations sur ce Claude Gauvreau, dont elle fut l’intime pendant ses années les plus vives, rejoignent intégralement l’authenticité de cet acteur culturel majeur du Québec du siècle dernier qui, il faut s’en aviser, pourrait tant tellement être encore parmi nous et nous parler de plus en plus (mon père, né en 1923, était encore frais et vif à quatre-vingt dix ans). Sur Claude Gauvreau, le communicateur naturel de la plus fulgurante des pulsions artistiques, madame Saint-Denis (qui, sans s’en aviser, se corrige presque) dit enfin:

Claude ne cessait de m’accompagner
implicitement
peu de rendez-vous fixés
quand je le voyais
il captait mon attention
par son authenticité
sa nature saine et globale
canalisant mes lectures
chaque fois que je le rencontrais
il avait toujours un nouvel auteur
dont il ne tarissait pas
et pour appuyer ses dires
il me prêtait les livres
qu’il avait le plus appréciés
 
BRETON    TZARA    DE NERVAL    JARRY
GHELDERODE    APOLLINAIRE    SADE
LAUTRÉAMONT    ARTAUD
 
Comme pour partager
Ses plaisirs intellectuels
 
érudit entre tous
sans étalage de sa compétence
il communiquait aux esprits chercheurs
toutes ses trouvailles voluptueusement
mais j’affirme qu’il ne m’a jamais rien imposé
sous prétexte de mode ou de propagande
m’acheminant plutôt vers la découverte de mon ego
et vers le choix d’une discipline propre à mon rythme
il m’a littéralement défrichée
balayant sans fausse pudeur
mes retenues mes préjugés
acquis chez les bonnes soeurs
creusant vigoureusement dans mon potentiel
pour y mettre à jour les racines de l’intelligence
du raffinement et de la lucidité
 
Claude n’imposait pas de dogme
il alimentait les désirs
en moi je vous le témoigne
il suscitait l’éveil de chaque cellule cérébrale
le besoin d’aérer pour meilleure réceptivité
et de rendre toutes cellules actives…….
 
ni égoïste ni tendancieux
Claude partageait hardiment
les fines fleurs de la connaissance
dispos à les cueillir
autant dans les livres
qu’avec les primitives
 
formuler sa pensée    la palper
jouir de chaque humeur
ne pas se laisser happer
par les convenances et les tabous
combattre pour des idées en évolution
plutôt que pour une idéologie théorique
la conscience toujours à l’affût
une manière de courage peu commune
marginale et difficile
une manière de Claude Gauvreau
 
s’il savait dire
il savait aussi entendre
attentif aux propos des autres
volontairement sourd aux potineries mesquines
des « sans cervelle » évitant de se tourmenter
de la futilité des imbéciles
surtout de leur négativisme
il ne commérait pas, n’intriguait pas
ne calculait pas, ne marchait pas sur les autres
il jouait face à face
la traîtrise l’a toujours étonné
 
Claude Gauvreau souriait beaucoup
grave et digne
sans l’affabilité hypocrite des meneurs de jeux
son rire parfois plus sonore
que sa voix si retentissante
dans les colloques publics
venait du profond de ses entrailles
ravageur tel un souffle de feu
détruisant les amères… inutiles

(Janou Saint-Denis 1978, pp. 53, 56, 58)

Voilà. Ben, c’est un peu lui, mon Gauvreau. J’avais treize ans quand il est mort mais ce que je lui dois, c’est encapsulé là, juste là, en ces rencontres vécues si intensément par Janou Saint-Denis circa 1952. Ce que cette poétesse sensible et sororale a eu la chance de palper en l’homme, je l’ai reçu, pour ma part, plus modestement, à travers l’œuvre et ce, références intellectuelles inclues. Bon, allez, j’ai pas à m’étaler sans fin. Vous avez mordu le topo. Le message, au fond, n’est pas nouveau nouveau. Il faut s’imprégner de l’art de Claude Gauvreau sans perdre vainement notre temps dans le filin-gluau-éructo-tamis-treille de son autopromotion frustrée, datée, barbée et contrite. Je vous laisse ainsi, sur deux échantillons de sa si puissante poésie semi-figurative, suivis d’un petit conseil cardinal.

Les serpents de neige

Fripés par le plat
Cernés par la lentille
Ils et il mangent dans le turchon de la malaisie histoïque
Abât les histrions ou que leur pisse surnage sur nos visages
bleus
La liqueur du courage coule sur les jalousies aux verts d’eau
rebords
La pinaïèche a relevé le col et sa massue veut du suc pour les
ourdis de la sonde
Ah         aaaaaaa        Arrêtez l’irisation
L’aveuglement vient pour les extasiés des beaux rums
processionnants
Ah la saison estivale est pour moi
Je serai un dieu de mon été
Lasssch !!!!!

Claude Gauvreau, recueil: Poèmes de détention, 1961.

(cité dans Saint-Denis 1978, p. 141)

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Notule sur l’Épormyable et sur le Je

L’agape ligaturée crache à chat et déjante
Hippartiri d’ermatel en talent recalé
Sibel rotol et calchimine cochinchiquette
Kermesse pâle et châles il m’est inné d’hennir
Cirer servimir jaunir jamais
Je suis crabure je suis irisé
J’allume des chalands au bout des bobèches d’arstride
J’allana jarnac alla jalna là
Je suis crabure je gis aporisé
Jaunir jamais Je non
Jehe jehanne je henni hànné
Je suis l’Épormyable
Et le Je.

Claude Gauvreau, recueil: J’ai ratéussi ma plonge, 1971.

(cité dans Saint-Denis 1978, p. 18)

Et voici maintenant, en point d’orgue, mon petit conseil cardinal. Plus que tout, il faut écouter Claude Gauvreau réciter lui-même ses textes. Tout ce qui compte est là. Qu’est-ce que c’est gros. Mais aussi, ouf, qu’est-ce que c’est grand. Indubitablement, Claude Gauvreau est épormyable. Pointfinalbâton. J’ai dit.

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SOURCE

Saint-Denis, Janou (1978), Claude Gauvreau, le cygne, Presses de l’Université du Québec, Montréal et Éditions du Noroît, Saint-Lambert, 295 p.

claude gauvreau le cygne

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41 Réponses vers “Claude Gauvreau: l’Épormyable”

  1. Tourelou said

    Mon plus cher ami est un orignal érudit, un peu genre épormyable, qui m’offre les jouissances de sa lecture à voix haute. Une forte plaisante découverte qui fait de moi une janou boubou gaga ahou ed popo opeop fou.

    Point barre.

  2. Égérie said

    Il a l’air plutôt craquant sur la photo là. Et sur le film, il a du tonus, de l’élan (orignal). Alors, est-ce qu’on sait si Janou lâcha son fou et le baisa? Sauvagement?

    • Ysengrimus said

      Madame Janou, veuve Saint-Denis (nom du feu mari, un acteur de théâtre mort dans l’explosion de gaz de son apparte), en tout cas, le nie:

      Il n’y a jamais eu de liaison
      entre Claude Gauvreau et moi
      nulle implication de l’espèce
      présence / absence
      brisure / réconciliation

      OUI plutôt
      une réciprocité constante
      un feu central

      entre Claude Gauvreau et moi
      transmissions viscérales
      projections ultra-sensorielles
      énergies traversées

      dans nos rencontres sporadiques
      joies indélébiles

      par delà nos «voyages vers l’amour et l’en-dedans»
      des silences parleurs des douleurs cosmiques
      des moments électrisants des baignades d’yeux

      (Janou Saint-Denis 1978, p. 19)

      Voilà comment elle nie… Mais, bon, allez savoir. J’en nie des affaires, moi aussi…

  3. Caravelle said

    Il n’y en a pas un comme Ysengrimus pour nous faire partager le regard d’une femme sur quelque chose ou quelqu’un d’intéressant…

    [Toujours. – Ysengrimus]

  4. Catoito said

    Ce que tu nous dis, c’est que ces poètes sont plus intéressants dans leur poésie même que dans les propos victimaires d’eux-mêmes et de leurs thuriféraires sur eux-mêmes…

    [Voilà. J’ai pas besoin de me faire dire qu’il faut sentir Gauvreau pour comprendre le Grand Cosmos Bleu. J’ai juste envie de sentir Gauvreau et de découvrir les segments du propos de ses biographes quand ils le sentent (pas quand ils se plaignent et le victimisent). – Ysengrimus]

    • Catoito said

      Donc, tu veux Bataille sans les batailles de Bataille.

      [Exactement. Ces artistes m’intéressent de par la force effective et durable de leur poésie, pas parce qu’ils ont choqué les arriérés, les pense-petits et les ignares de leur temps. Je laisse aux surréalistes le soin d’écrire UN CADAVRE et de faire les pamphlétaires contre les sots de jadis (dont la chaloupe penche toujours du même bord de toute façon, d’époque en époque — lassant). Je suis ici pour la musique, moi. Par pour la querelle des-anciens-et-des-modernes entre critiques minus et concertistes outrés. – Ysengrimus]

      • Magellan said

        Mais quand même. Ces artistes ont toute une histoire, souvent captivante. Comment peux-tu les séparer ainsi des conflits qu’ils ont mené pour s’extirper au jour?

        [De la même façon que je distingue un bon repas des sueurs des bienveillants marmitons qui l’ont mené jusqu’à moi. L’histoire de ces figures est non seulement passionnante mais cruciale pour une compréhension adéquate des arts et des modes de production les engendrant. Cependant sur l’histoire de l’art, deux choses. 1) Les artistes ne sont pas leurs propres historiens. Ils sont sujets d’histoire. Ils peuvent témoigner sur leur vécu et nous dire la virulence des débats et des combats qui les déterminèrent mais on va laisser la description de leurs conditions historiques objectives aux historiens, sinon c’est de la mytholâtrie sacralisante et on partage alors les illusions d’une époque sur elle-même, ce qu’il ne faut jamais faire en Histoire. 2) Quand j’écoute du Charlie Parker, je m’imprègne de musique, pas d’historiographie. Laissons la musique jouer dans nos thorax et on fera la genèse socio-matérielle des musiciens un autre jour. Pas jamais, hein, juste: un autre jour. Épargnons un peu notre expérience sensuelle en art. Musique n’est pas musicologie. Les deux sont cruciales. Leur mélange est potentiellement indigeste autant que méthodologiquement boiteux. – Ysengrimus]

    • Chloé said

      J’ai honte d’avouer que j’ai un peu trop souvent laissé les « légendes mondaines » de certains artistes empoisonner mon expérience de leurs œuvres.

      [Il n’est jamais trop tard pour se réformer, Chloé. Les bruits ne méritent que mépris. Seule la musique compte… – Ysengrimus]

  5. Mura said

    C’est marrant ce genre de biographie en vers libres.

    [Tout l’ouvrage de madame Saint-Denis est écrit comme ça. Sans ponctuation. – Ysengrimus]

  6. Vanessa Jodoin said

    Un portrait de Janou Saint-Denis. Elle avait de grand yeux. SOURCE

    janou-saint-denis

    Et la voici ici en train de réciter:

  7. Marie Verne said

    C’est vrai par contre que ceci:

    la masse ignore la poésie et les poètes
    on ne peut la blâmer
    les quelques poèmes lus
    au hasard d’une scolarité
    plus ou moins efficace
    sont loin d’être suffisants

    pue un peu son élitisme à l’ancienne. Tout le monde connait des portions de poésie, souvent fort importantes. Dans les traditions folkloriques, dans la chanson populaire, dans les comptines et fables d’enfants apprises AVANT l’école. Janou, tu nous regardes tous et toutes de bien haut ici.

    [Je seconde. – Ysengrimus]

  8. Julie Soulange said

    Et ceci:

    Claude Gauvreau, c’était gros.
    C’était verbal, c’était torrentiel.
    Ça montait à l’assaut du ciel
    Peinturluré bleu poudre dans le plafond théâtral
    De je ne sais quelle salle paroissiale
    Inévitablement, implacablement provinciale.

    capture merveilleusement à la fois la grande force et la petite petitesse de Gauvreau.

  9. Julie Soulange said

    Je voudrais ajouter qu’Ysengrimus nous a lié ceci:

    Les poèmes que Gauvreau récite ici, sont en ordre chronologique. Il admet alors lui-même (à demi-mots et à mi-chemin mais quand même) passer parfois du non-figuratif au semi-figuratif, selon un mouvement que nous avait très bien décrit Ysengrimus dans cet article-ci.

    [Absolument exact. Bien vu, Julie. – Ysengrimus]

    • PanoPanoramique said

      Je comprends rien de ce gars… mais le monde ont l’air de tripper, en tout cas…

      • Caravelle said

        Cher Monsieur Panoramique. Toujours au sommet de votre forme, à ce que je vois. Vous allez bien?

      • PanoPanoramique said

        Très bien Madame DesCarpathes. Et vous? Laissez moi deviner. Ysengrimus vous dit que Claude Gauvreau est intéressant donc, subitement, vous trépidez d’intérêt.

        [Ça suffit, PanoPanoramique. – Ysengrimus]

      • Caravelle said

        Mais absolument. Et, sans surprise, la chose continue de vous échapper totalement…

        [Bon, j’annonce la fin immédiate de cette tangente d’échanges – Ysengrimus (qui caviardera s’il le faut)]

  10. Gudule said

    En tout cas, la façon dont elle nous parle de cet homme nous donne envie d’avoir pu le rencontrer:

    s’il savait dire
    il savait aussi entendre
    attentif aux propos des autres
    volontairement sourd aux potineries mesquines
    des «sans cervelle» évitant de se tourmenter
    de la futilité des imbéciles
    surtout de leur négativisme
    il ne commérait pas, n’intriguait pas
    ne calculait pas, ne marchait pas sur les autres
    il jouait face à face
    la traîtrise l’a toujours étonné

    Claude Gauvreau souriait beaucoup
    grave et digne

  11. Sylvie des Sylves said

    On dirait du Tristan Tzara (1896-1963).

    [Vous pourriez nous en amener? – Ysengrimus]

    • Sylvie des Sylves said

      Oui. Voici:
      .

      Pélamide

      a e ou o youyouyou i e ou o youyouyou
      drrrrrdrrrrdrrrrgrrrrgrrrrrgrrrrrrrr
      morceaux de durée verte voltigent dans ma chambre
      a e o i ii i e a ou ii ii ventre montre le centre je veux le prendre ambran bran bran et rendre centre des quatre
      beng bong beng bang où vas-tu iiiiiiiiupft
      machiniste l’océan a o u ith
      a o u ith i o u ath a o u ith o u a ith
      les vers luisants parmi nous
      parmi nos entrailles et nos directions
      mais le capitaine étudie les indications de la boussole
      et la concentration des couleurs devient folle
      cigogne litophanie il y a ma mémoire et l’ocarina dans la pharmacie
      sériciculture horizontale des bâtiments pélagoscopiques
      la folle du village couve des bouffons pour la cour royale
      l’hôpitale devient canal
      et le canal devient violon
      sur le violon il y a un navire
      et sur le bâbord la reine est parmi les émigrants pour mexico

      (Tristan Tzara, Pélamide, 1918)

  12. Fridolin said

    La grande nuit de la poésie de 1970 a fait l’objet d’un documentaire intitulé La Nuit de la Poésie 27 mars 1970. Le voici, en intégral:

    [Vidéo disparue — Ysengrimus]

    [Grand merci, Fridolin. Une merveille… à visionner jubilatoirement, Tout y est! – Ysengrimus]

    • Emma Riveraine said

      Je viens de le visionner. Quelle émotion. Et quarante-cinq ans plus tard, ça nous parle toujours autant…

  13. Mistral Simoun said

    « J’expurge ouvertement et sciemment mon limpide agacement face à ces artistes hyper-égomanes (genre Bataille, Artaud, Robbe-Grillet, Gauvreau) qui bizounent ouvertement leur œuvre (d’autre part habituellement importante) en voulant convulsionnairement perpétuer, à leur strict bénéfice, ce sacré Sacré dont on avait pourtant si fermement dépouillé la prêtraille malodorante et réfractaire. »

    Ceci est TRÈS vrai. il faut aimer nos artistes perturbateurs en profondeur SANS les sacraliser. Sacraliser c’est oublier que l’art est profane, autonome, puissant et libre. On a pas besoin de maitres penseurs et les artistes sont admirables sans être divinisables. Leur force philosophique est justement là.

    [Dans le mille, Mistral Simoun. – Ysengrimus]

    • Mistral Simoun said

      C’est toi qui m’y a fait penser dans une formulation aussi efficace, Ysengrimus. C’est ce que le billet d’aujourd’hui signifie, non?

      [Oui. – Ysengrimus]

  14. Brigitte B said

    Bon, je plonge car je sais qu’Ysengrimus respecte toutes les questions. Qu’est-ce que ça signifie l’Épormyable?

    [C’est un mot inventé par Gauvreau. Ça fait référence à sa grande pièce de théâtre-four-fou de 1956 La Charge de l’orignal épormyable. Ça décrit quelque chose de si tonitruant, de si puissant, de si formidable qu’il faut forger un mot pour le dire. Je m’autorise ici à appliquer le descriptif à Claude Gauvreau même… – Ysengrimus]

    • Odalisque said

      Merci, Brigitte B. Je me posais la même question et j’osais pas… Merci Ysengrimus pour la réponse.

    • Brigitte B said

      Merci, Ysengrimus. et… un orignal?

      [Ici, par contre, le mot ORIGNAL est parfaitement reçu en français du Québec. C’est l’élan d’Amérique. – Ysengrimus]

      orignal

      • Vernoux said

        Le mot orignal est par original… hu, hu, hu…

        [Bien vu, Vernoux. C’est presque du Gauvreau, ton mot… – Ysengrimus]

  15. Line Kalinine said

    Gauvreau s’incarnait personnellement dans son œuvre. Voyez la page couverture de son grand roman d’amour passionnel. Il est là: avec sa moustache.

    Gauvreau-Beaute-baroque

  16. Le Boulé du Village said

    Trois ans après la mort de Gauvreau, Robert Charlebois a mis un de ses poèmes en chanson. Pas mal du tout.
    .


    .
    .
    .

    TROP BELLE POUR MOURIR

    Paroles: Claude Gauvreau
    Musique:Robert Charlebois

    Coque fedouille sur la blonde tignasse
    Prairie d’étoiles sur les mirettes
    Gambettes d’ocelot
    Nombril diamenteux
    Ses bras sont un serpent au sang chaud
    Zoutépaudévafe
    Zoutépaudévafe
    Zoutépaudévafe
    Zoutépaudévafe
    Sig aligne a tu you zu
    Signe aligne a ti zaille-zi

    Elle a étranglé le bedeau
    Boubionne sous la dictée
    Ocelot coco cautérisé
    Diamantil à feuillure
    Ses bras sont un serpent au sang chaud
    Zoutépaudévafe
    Zoutépaudévafe
    Zoutépaudévafe
    Zoutépaudévafe
    Sig aligne a tu you zu
    Signe aligne a ti zaille-zi

    Le poil roussillon l’a trahie
    Ca ca coum coum ca chot
    Cachot sans cachalot
    À ligures à lézards
    Sous bras pâles de serpent au sang chaud
    Zoutépaudévafe
    Zoutépaudévafe
    Zoutépaudévafe
    Zoutépaudévafe
    Sig aligne a tu you zu
    Signe aligne a ti zaille-zi

    On lui a coupé les bras
    Elle a dressé les serpents autonomes
    Qui lui servent la soupe à la cuillère
    Mirée de son œil myosotis
    Sans bras de serpent au sang chaud
    Zoutépaudévafe
    Zoutépaudévafe
    Zoutépaudévafe
    Zoutépaudévafe
    Sig aligne a tu you zu
    Signe aligne a ti zaille-zi

    (ad lib)

    [On sent encore planer ici le souvenir lancinant de Muriel Guilbault. Merci mon petit Boulé. C’est vrai qu’il y a quelque chose chez le Charlebois des débuts qui rencontre harmonieusement Gauvreau. – Ysengrimus]

    • Daniel Mercurin said

      Bonjour,
      J’ai toujours beaucoup apprécié cette chanson de Robert Charlebois. Je viens seulement de m’enquérir du nom de l’auteur. Quelqu’un pourrait-il me dire de quel ouvrage de Claude Gauvreau est tiré ce texte? A-t-il écrit d’autres poèmes du même genre?

      Existe-t-il une traduction en français de ces vers:

      Zoutépaudévafe
      Sig aligne a tu you zu
      Signe aligne a ti zaille-zi

      Merci pour votre aide et vive les serpents autonomes!

  17. Serge Morin said

    Et surtout, ne pas oublier l’excellent film documentaire CLAUDE GAUVREAU, POÈTE de Jean-Claude Labrecque, 1974.

    http://www.nfb.ca/film/claude_gauvreau_poete/

    [Je seconde. – Ysengrimus]

  18. La Vache Enragée said

    Savez-vous qu’il a aussi écrit le livret d’un opéra composé par Serge Provost qui s’intitule Le Vampire et la nymphomane?

    http://www.chantslibres.org/fr/productions/vampire/

    [Vous me l’apprenez, la Vache. – Ysengrimus]

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